Frédéric, agriculteur, est maire de sa commune rurale. Aujourd’hui, tout le village est réuni pour voter pour ou contre la mise en place d’antennes-relais dans le village. Louise, une fervente militante du non dans son association se heurte à lui afin de le mettre face à ses contradictions et tenter de faire bouger les personnes présentes ce soir-là. D’emblée, elle nous interpelle : « Votre voix a-t-elle vraiment un rôle ? »…
A partir de ce constat, nous allons revenir en arrière et découvrir la vie de Frédéric et de sa femme Sahar, tout juste parents. Ils travaillent dans l’exploitation familiale avec Elies, le frère de Sahar qui s’investit pleinement sur les terres. Fred, lui, gère davantage la partie financière mais le couple accumule les dettes et se trouve face à l’obligation de prendre une hypothèque sur la ferme. De plus en plus d’agriculteurs quittent la ville. On est en face d’une crise terrible au moment-même où le monde évolue, cherche de plus en plus à communiquer et où l’on vient chanter les mérites des antennes-relais nouvelle génération. Faut-il céder aux sirènes de la corruption ou agir comme le colibri en faisant sa part pour que les choses changent ?
Cette pièce met le spectateur en véritable position de questionnement. A travers les personnages, on vit réellement par procuration les conflits d’intérêt, les difficultés du quotidien, d’une société qui va mal. Et si le sujet est ici davantage porté sur l’agriculture, il pourrait largement s’étendre à d’autres domaines comme l’éducation, l’hôpital… Ne sommes-nous pas au final les marionnettes d’un groupe de personnes, qui une fois élues, peuvent décider de tout et pour tout ? Quelle est notre part dans la société ? Avons-nous vraiment le choix ?
Le brio des acteurs (qui interprètent plusieurs rôles) nous emporte par leur dynamisme et la justesse de leur jeu. On apprécie leur fraicheur, leur diction, leur prestance, leur force, leur vérité. Avec un rythme soutenu, des retours en arrière et de brillants effets de mise en scène, on est transporté dans ce récit qui n’est finalement pas si loin de notre vie. Le décor, qui paraît simple avec ses deux écrans posés de part et d’autre du plateau, se révèlera plus animé avec l’apparition de projections pour figurer un ascenseur ou d’une lampe pour la maison de Fred. On appréciera également la couverture utilisée pour symboliser le bébé. Enfin, on est ému par la présence sur scène d’une violoniste (et compositrice !) qui accompagne les acteurs tout au long de la pièce, avec beaucoup de finesse et de tendresse.
« Coupures » est un spectacle engagé. Il permet d’éveiller davantage les consciences. D’ailleurs, la compagnie distribue à la sortie du spectacle des « petites coupures », qui permettent de faire bénéficier d’un pourcentage de réduction, d’une somme offerte ou d’invendus dans un de leurs commerces partenaires.
« Coupures » est une véritable réussite avec des comédiens à la hauteur du texte : on est face à un théâtre intelligent qui pousse à réfléchir, sans jamais être rébarbatif. A ne pas manquer !